Le bail à construction a été pensé originairement par le législateur comme permettant au propriétaire du sol, le bailleur, de devenir, à l'expiration de la durée prévue, propriétaire des constructions édifiées et financées par le preneur à bail. C'est le mécanisme de principe appelé parfois en pratique « bail à construction à l'endroit». Pour autant, puisque le contenu du contrat est laissé à la liberté contractuelle, les parties peuvent en aménager le contenu et envisager un autre sort pour les constructions édifiées par le preneur à bail. Ainsi, une clause largement usitée dans le contrat de bail à construction est celle octroyant au preneur à bail, à son extinction, la propriété même du sol, tout en conservant la propriété des constructions édifiées. Dans ce cas de figure, la durée longue du contrat lui permet d'acheter le terrain. Cette hypothèse est dénommée en pratique « bail à construction à l'envers » (parfois aussi « bail à construction inversé ») et, bien qu'assez surprenante par rapport aux objectifs initiaux du contrat, elle existe depuis 1964. Le preneur à bail va régler durant le bail un supplé- ment de loyer (parfois appelé « surloyer ») qui comporte le prix du foncier. D'un point de vue financier, le montage est intéressant aussi bien pour le bailleur que pour le preneur à bail. Pour le propriétaire du sol, ce type de montage lui « permet d'éviter de payer l'impôt sur les plus-values lors de la vente de son terrain [car] [...] quand la plus-value réalisée à cette occasion est imposée selon le régime des plus-values des particuliers [...] [le dispositif présente l'attrait] [...] que la durée de possession prise en compte est la période comprise entre la date d'acquisition du terrain par le bailleur et la date de transfert de propriété en fin de bail » (1). Puisque le bail est au minimum conclu pour une durée de dix-huit ans, cette exonération est forcément obtenue. Bien sûr, pour le preneur, il y va aussi de son intérêt, car cela lui permet aussi d'étaler le coût du foncier sur toute la durée du bail à construction. Pour autant, le « bail à construction à l'envers » est rarement utilisé par les constructeurs d'immeubles collectifs aux fins de logement. Certes, à l'occasion de ventes en état futur d'achèvement, on peut envisager qu'une quote-part indivise du droit au bail à construction soit transmise aux différents acquéreurs. Ainsi, la copropriété qui en résultera sera « assise sur ce droit commun indivis sur le sol » (1), sachant qu'en raison du montage retenu à la fin du bail à construction, les copropriétaires bénéficieront de la propriété entière du sol sur lequel leur immeuble a été construit. Pour autant, ce montage n'est resté qu'anec-dotique en pratique, car le fonctionnement de la copropriété pendant la durée d'exécution du bail à construction laissait un certain nombre de questions juridiques en suspens. La loi du 10 juillet 1965 relative au statut de la copropriété des immeubles bâtis n'ayant pas envisagé ce cas de figure, il en résultait des divergences tant en pratique qu'en doctrine d'appréciation et d'application. Le géomètre-expert, face à cette situation, doit donc rester attentif. Plus globalement, la conciliation du droit propre aux baux réels avec celui de la copropriété laisse encore ouvertes des interrogations non totalement réglées. Si le législateur a pu intervenir (par exemple pour mieux concilier le droit de la copropriété avec le droit du bail réel solidaire; lire page 40), tout n'a pas encore été envisagé alors que la plupart des baux réels ont déjà plusieurs décennies d'existence derrière eux.
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